Geist: La présence représentée
6 mai – 3 juin, 2017
Isabelle Demers
Isabelle Guimond
Gabrielle Lajoie-Bergeron
Gabriel Morest
Francis Montillaud
Élise Provencher
Sophie Latouche
Commissarié par Christian Messier
Geist : la présence représentée
Je regarde des œuvres de Marlene Dumas dans un livre. Je suis frappé, comme chaque fois que je vois une représentation de l’être humain, par une espèce de profondeur, comme si au-delà de la figure, il y avait autre chose; un genre de « je ne sais quoi ». On dirait quasiment, comme moi, que le sujet est conscient de lui-même et de son environnement. Cette impression se situe possiblement dans la même famille que l’effet de profondeur provoqué par la perspective. En effet, selon le neurophysiologiste Alain Berthoz, le cerveau aurait la capacité de recréer virtuellement l’espace sous différents points de vue sans même que nous ayons à nous déplacer. Cette faculté aurait selon lui des liens neurologiques évidents avec l’empathie qui, étant la capacité à se mettre à la place d’autrui, nécessiterait aussi un changement de point de vue et donc, activerait des régions similaires du cerveau. Tout comme avec la perspective, la représentation de l’être humain, particulièrement l’expression de ses émotions, affecte non seulement notre perception, mais aussi notre ressenti et ce, à l’aide de seulement quelques lignes bien placées. C’est ce qui me fascine : à quel point notre corps reconnait son semblable à partir de quelques formes et à quel point nous avons du mal à ne pas laisser la matière qui constitue une œuvre s’incarner d’une « présence humaine ». D’où le titre Geist, dont la traduction de l’Allemand est Esprit.
Présenté sous l’éclairage de la biologie, plus précisément de l’empathie, la représentation de la figure humaine s’adresse davantage au ressenti du spectateur, l’expression des émotions étant, provenant de l’émetteur comme du récepteur, un mécanisme automatisé de communication dédié à la survie. Ce qui est intéressant, c’est que ce mécanisme s’enclenche même au contact de représentations. C’est de ce point de vue que la sélection des œuvres a été réalisée, c’est-à-dire la force de l’affect provenant de la manière dont des êtres humains ont été représentés. Il ne s’agit pas ici que de signifier l’être humain, il s’agit de faire vivre l’expérience du contact avec autrui. Et parce que le rire, pour son rôle homéostatique, est aussi un système de régulation du corps lié d’une certaine façon à la survie, les œuvres choisies sont toutes imprégnées à différents niveaux d’un effet comique; parfois grotesque, parfois mystérieux et toujours teinté d’une certaine étrangeté.
C’est donc avec plaisir que je vous présente le travail de Sophie Latouche, Isabelle Demers, Isabelle Guimond, Gabrielle Lajoie-Bergeron, Gabriel Morest, Élise Provencher et Francis Montillaud dont les œuvres mettent bien en valeur cette idée de la présence humaine, mais qui aussi, bien sûr, me touche particulièrement. Les artistes du dernier siècle ont reviré dans tous les sens la question du lien entre l’art et la vie. Cette exposition renouvelle aussi la question, non pas simplement par la représentation du vivant, mais plutôt du point de vue de l’expérience corporelle que vit le spectateur face à l’incarnation d’autrui dans l’œuvre d’art.
Christian Messier
— english —
Geist: The Human Presence Represented. Curated by Christian Messier
Galerie Laroche/Joncas is pleaed to present Geist: The Human Presence Represented from May 6 – June 3, 2017, with works by Isabelle Demers, Isabelle Guimond, Gabrielle Lajoie-Bergeron, Sophie Latouche, Francis Montillaud, Gabriel Morest and Élise Provencher. The exhibition of sculpture, painting, drawing, ceramics and video works is curated by Christian Messier, artist, and presently a PHD candidate at the Université du Québec à Montréal.
“I’m looking at works from Marlene Dumas in a book. I am struck each time I see a representation of the human body by a kind of depth that is beyond the figure, something else; a kind of ‘je ne sais quoi’. It feels as if, like me, the subject is conscious of him of herself and of its environment. This impression is very similar to the effects of depth, which is provoked by perspective.
According to neuro-psychologist Alain Berthoz, the brain has the capacity of virtually recreating space in different points of perspective without having to physically move ourselves. This faculty would have, according to Berthoz, neurological connections with empathy which is the capacity to put ourselves in the place of someone else, necessitating a change of perspective and thus would activate similar regions of the brain.
As with perspective, the representation of the human body, particularly the expression of emotions, affects not only our perception but how we can incarnate a ‘human presence’. Hence the title Geist, whose translation from German is Spirit.
Presented under the auspices of biology, more precisely empathy, the representation of the human figure addresses the felt emotions of the spectator and the expression of emotions which begins with the transmitter to the receptor, thus being an automated mechanism of communication for survival. What is interesting here is that this mechanism is triggered upon contact of representations.
It is from this perspective that the selection of works in the exhibition has been made. The effect originating from the way the human body has been represented. It is not about signifying the human body, it’s about bringing the experience of contact with the other. And since laughter, for its role, is also a system of regulation of the body connected in a certain way to survival, the works chosen for the exhibition all have a different level of a comic effect; sometimes grotesque, at times mysterious and always tainted with a certain strangeness.
It is thus with great pleasure that I present the works of Isabelle Demers, Isabelle Guimond, Sophie Latouche, Gabrielle Lavoie-Bergeron, Francis Montillaud, Gabriel Morest and Élise Provencher whose works put forward the idea of the human presence, but also because these works really touch me.
The artists of the last century have explored all kinds of ways to question the link between art and life.
This exhibition renews that question as well, not only with the representation of the living, but from the experience of the spectator when faced with the incarnation of another person in a work of art.”
Christian Messier