Sylvie Readman
À contretemps II : site spécifique

23 août – 23 septembre, 2017

 

À contretemps II : site spécifique

Depuis quelques années, Sylvie Readman  travaille sur  le développement de  projets  centrés sur la temporalité de l’image photographique, pensée en lien avec l’exploration de lieux porteurs d’une certaine sédimentation historique. L’exposition actuelle s’est principalement élaborée à partir du site de l’ancienne base militaire de St-Hubert, lieu que l’artiste avait repéré quelques années auparavant dans le contexte de travaux antérieurs.

Sur un plan évènementiel, le territoire occupé par la base militaire s’est révélé être un lieu étonnant de convergences historiques, traversé de récits collectifs intégrant le local et le global.  Notamment : la venue  du dirigeable R-100 qui devait assurer la liaison transatlantique entre Londres et son empire colonial (événement important relaté par la chanson Toujours L’R-100de la Bolduc); le rôle qu’a joué la base militaire pendant la seconde guerre mondiale, suivi de son développement considérable pendant la guerre froide; le corps du ministre Pierre Laporte retrouvé le 17 octobre 1970 à proximité de l’aéroport et identifié par le médecin militaire; la découverte du lieu de séquestration des ravisseurs felquistes, rue Amstrong, située aux abords de la base militaire en état d’alerte;  et enfin le décret ministériel de 1995 annonçant le démantèlement de la base militaire de St-Hubert et le gouffre financier du plan de revitalisation des infrastructures et de la zone aéroportuaire qui a suivi.

Pendant près de vingt ans, ce vaste périmètre constitué de bâtiments et de services, est demeuré à l’abandon. Attirée par les divers marquages temporels et la cristallisation des lieux, l’artiste a documenté pendant près de trois ans ce territoire déserté, véritable enclave marginalisée située au centre d’un arrondissement de la rive sud.  Par-delà la désuétude des diverses installations, c’est l’idée même de remonter le temps en établissant un parcours transversal qui a été privilégiée.  Malgré l’état d’abandon et de délabrement des bâtiments, la piscine, le terrain de basketball, le mess des officiers et l’hôpital semblaient encore habités par les traces d’une communauté fermée qui s’est inscrite à même ce territoire.

Si les images sont hantées par la question de la disparition, leur installation dans l’espace est elle-même travaillée par un principe analogue d’évidement. L’organisation d’ensembles cherche à établir des correspondances formelles et spatiales entre les images, qui permettent de faire émerger des repères temporels. Espace de projection mentale évoquant la partie manquante,  la forme vidée de son contenu, mais aussi et de manière plus abstraite, le mouvement perpétuel du temps et des transformations incessantes qu’il génère sur le territoire.  À partir de cette forme de méditation portée aux cycles temporels se développe ainsi en filigrane cette idée de présences spectrales, à laquelle fait écho l’œuvre vidéo qui accompagne l’exposition.

Sylvie Readman est originaire de la ville de Québec, elle vit à Montréal depuis plusieurs années et enseigne à l’École des arts visuels et médiatiques de l’UQÀM. Elle détient une maîtrise de l’Université Concordia (MFA, 1984).  Ses œuvres se retrouvent dans de nombreuses  collections : Musée des Beaux-arts de Montréal, Musée d’art contemporain de Montréal, Musée national des Beaux-arts du Québec, Musée des Beaux-arts du Canada, Winnipeg Art Gallery, Musée d’art de Joliette, Musée de la photographie à Charleroi, Belgique.

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